Article sur la fanfiction écrite pour « l’Express »

Ceci est un vieil article, rédigé pour le magazine « L’Express » et publié le 23 avril 2013, que je recopie/colle pour mon blog. Lien direct sur le site de « L’Express ». Dans cet optique, je songe à rédiger d’autres billets sur le sujet de la fanfiction et de l’écriture en général.

Yaoi? Un cri de guerre. Lemon? Un hashtag de Twitter. Kink? La nouvelle collection de chaussures Adidas. PWP? Le titre du dernier album de Psy. Vous avez tout faux!

Bien avant le phénomène Fifty Shades of Grey, l’écriture de textes érotico-porno ou porn-érotique faite par des femmes existait. Mon article s’intéresse plus particulièrement à l’écriture de fanfictions, ces textes qui reprennent des supports existants (livres, films, séries TV, mangas) tels Harry Potter, Twilight ou Naruto – pour ne citer que les plus exploités.

Comme beaucoup de fans, j’ai été souvent déçue par une fin, un personnage qui n’était pas assez exploité par l’auteur. Et je me suis mise à l’écriture des fanfictions, plus particulièrement axée sur la romance. Car pour moi, comme nombre d’autres auteurs, c’est l’énorme avantage de ce genre: imaginer nos couples favoris dans des situations inédites. Mais, peu à peu, les amourettes de lycée lassent et on se lance dans des textes où les protagonistes s’envoient joyeusement en l’air.

Dans le petit monde de la fanfiction, on peux trouver de tout: du classique missionnaire hétéro au texte kinky (qui tend vers le pervers). Donc, BDSM trash, du Yaoi (relation homosexuelle masculine), du Yuri (relation homosexuelle féminine), de la bisexualité, des Threesome(relation sexuelle à trois), des Moresome (relation sexuelle avec plus de trois personnages ou véritable orgie)… Tout est possible! Le tout, pouvant s’intégrer dans une fiction à chapitres comme dans un one-shot (histoire à chapitre unique appelé PWP pour Porn Without Plot ou Porno sans scénario). Comme dans la littérature plus « classique », la qualité y est extrêmement variable, on peut y dénicher de véritables perles comme des fast-fics (fictions écrites à la va-vite). Vous ne regarderez plus Harry Potter comme avant!

Des sites comme Fic Is Not The Enemy propose une bibliothèque de bonnes ou excellentes fanfictions à lire dans des fandoms variés. Les deux questions qui reviennent souvent sont: « Pourquoi écrire du cul? » et « Qui sont ces auteurs femmes qui écrivent du porno? » La littérature porn et érotique est un genre comme un autre. Elle trouve son public car il y a des amateurs de ce type d’ouvrage. La preuve est l’engouement qu’il y a eu avec Fifty Shades of Grey ou encore 80 notes de Jaune. Il en est de même dans la fanfiction. Les auteurs prennent leur pied à écrire des textes torrides comme leurs lecteurs prennent le leur en lisant ces histoires.

A la seconde question, ces femmes ne sont pas des frustrées sexuellement, frigides, des filles faciles ou autres clichés que l’on retrouve régulièrement. Les auteurs que je connais et qui écrivent ce type de texte sont toutes des femmes épanouies. Il n’y pas non plus de « profil social type » ou « statut type » pouvant les définir: professions libérales, fonctionnaires, employées dans le privé, chômeuses, étudiantes, intérimaires… elles sont toutes différentes. Ce qui les lie? Leur passion pour l’écriture. Elles couchent simplement sur papier les scénarios qu’elles imaginent dans l’optique d’une éventuelle publication sur des sites comme Fanfiction.NET ou ArchiveOurOwn.org.

Leur style et les genres sur lesquels elles écrivent sont également très variés: vanille ou citronné à l’extrême (le terme lemon signifie d’ailleurs citron), textes hétéros classiques ou fictions homosexuelles, à deux ou à plusieurs, il y en a pour tous les goûts. Les textes peuvent être crus de réalisme ou totalement fantaisistes. Qu’importe, le but est simple: se faire plaisir dans l’écriture.

Enfin un dernier point qui me semble important à aborder: l’écriture de romances homosexuelles masculines par des femmes pour des femmes. Il m’est ressorti deux axes principaux qui expliquent cet engouement. En écrivant sur un couple de même sexe mais de sexe opposé à l’auteur, on ne dévoile pas ses propres fantasmes, on crée une sorte de distance entre le soi réel et le soi auteur, ne pas s’impliquer dans l’écriture d’une scène intime. Ensuite, plus pragmatique: pourquoi seuls les hommes peuvent fantasmer sur deux belles femmes ensemble faisant des galipettes (très souvent calqué sur un modèle hétérosexuel, loin de la réalité de la sexualité des vraies femmes lesbiennes)? Les femmes aussi aiment admirer un beau mâle. Pourquoi pas deux dans ce cas, sans l’intervention de la nunuche de service? D’ailleurs, on remarquera que les mangas Yaoi qui ont inspiré un certain nombre de textes Yaoi sont calqués eux aussi sur un modèle hétérosexuel avec un Seme (Dominant) et un Uke(Dominé) avec un certain nombre de clichés. Nombre de gays ne se retrouvent pas de ce genre de littérature ou manga.

Bref, le sujet est vaste et peut être rédigerai-je un second article sur l’univers méconnu de la fanfiction.

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